Africa Renaissance

Africa Renaissance

L'Afrique et ses dirigeants

L'Afrique a besoin
de dirigeants d'exception




Il est une donnée qui échappe souvent aux Africains lorsqu'ils se penchent sur les anomalies fonctionnelles de leurs Etats. Certains pensent que les principes fondateurs d'un Etat digne de ce nom, et qui sont d'essence occidentale, ne sont pas suffisamment maîtrisés. Ce serait alors la raison majeure pour laquelle les structures étatiques ne sont point cohérentes, ce qui aurait pour conséquence le dysfonctionnement que l'on constate. S'il y a probablement du vrai dans cette manière de percevoir les choses, cette anomalie constatée est en réalité de moindre importance par rapport au fait que la qualité des hommes qui nous dirigent est la véritable raison de bien de difficultés dans la gestion des Etats africains. En effet, au-delà de la valeur et de la qualité intellectuelle qui souvent manquent aux principaux dirigeants des Etats, à cause de raisons diverses ou des conditions particulières de leur accession au pouvoir, de même qu'au copinage dans le choix de leur entourage, il reste que la moralité et la dignité restent incontestablement ce qui leur manque le plus.
D'abord, du fait que la quasi-totalité de nos dirigeants sortent des grandes écoles et les instituts supérieurs dits modernes, leur moralité et cette notion d'honneur et de dignité qui faisaient que l'Africain traditionnel préférait la mort à la honte, leur manquent totalement. Beaucoup de ces dirigeants ont un idéal de vie tel que ce qui leur importe le plus, c'est leur propre profit dans toute action qu'ils entreprennent : "Qu'est-ce que je gagne ?", "Quel intérêt ai-je dans telle entreprise ?", tels sont leurs arguments massues. Certains, par vantardise ou plus exactement par bêtise, affirment : "J'ai tel diplôme, il me faut tel salaire !", oubliant que les salaires ne doivent pas être liés à des diplômes autant qu'aux possibilités de chaque pays ! N'est-ce pas qu'il faut d'abord produire les biens, avant d'espérer les consommer ? Pour nos grands hommes, cette évidence n'est pas aussi claire. L'un des problèmes qui doit par conséquent recevoir un traitement adéquat, c'est le genre de dirigeants qui seront les plus aptes à diriger les Etats africains à l'heure actuelle. Nous avons besoin d'hommes d'exception pour ce faire, et ce sont des quidams qui prétendre le réussir ! Pourquoi faut-il croire que nous ayons un tel besoin de ce genre d'hommes de très grande particularité ?
Cela se comprend aisément puisque l'Etat africain, du fait de son histoire récente et même actuelle, a des contraintes particulières qu'il faut absolument vaincre :
L'avidité des ex-colons n'est pas encore terminée. Ces derniers font semblant d'être partis alors que ce sont eux qui veulent tirer toutes les ficelles de nos Etats soi-disant indépendants. Par conséquent, vouloir être dirigeant dans nos pays, c'est accepter d'aller contre leurs intérêts qui sont le contraire de ceux de nos populations. Et comme chez eux, "La fin justifie les moyens", ils sont prêts au pire pour sauvegarder leurs avantages. Cela signifie que quelqu'un qui n'est pas prêt à accepter des risques pour contrer leurs manipulations ne pourra jamais être un bon dirigeant dans nos contrées. Mais ces risques vont précisément contre la façon de voir de nos élites, surtout prêtes à vouloir le beurre et l'argent du beurre. A la moindre difficulté, ils préfèrent s'allier aux ex-dominateurs pour opprimer leurs propres peuples. C'est le contraire de ces dirigeants veules et poltrons, apatrides et stupides, qu'il faudra à l'Afrique. Nous avons besoin d'hommes courageux, à la limite téméraire à la Thomas Sankara pour ce continent, à l'heure actuelle.
Il faudra de même des dirigeants imaginatifs, inventifs, créatifs. Pourquoi ? Parce que dans nos pays en train de vouloir se dresser, tout doit être inventé. Les copistes, les singes sont de peu d'utilité dans un tel cas de figure. Ce qui est le cas de la quasi-totalité de nos dirigeants. Le plus grand danger qui menace l'Afrique depuis son indépendance, c'est de vouloir faire entrer nos populations, nos sociétés dans des moules qui ne sont pas faits pour elles. Et, malheureusement, c'est là les défauts essentiels de nos dirigeants, éduqués pour adopter au lieu d'adapter la modernité à nos aspirations les plus profondes ! Si les premiers responsables n'ont pas ces qualités de créativité et d'inventivité, il sera difficile de pouvoir seulement compter sur d'autres pour ce faire. L'adage africain affirme bien que : "Seuls les tortues savent par où passer, pour se mordre !", entendant par là qu'il est impossible à celui qui n'a pas une qualité donnée, de pouvoir réellement l'apprécier chez les autres. Le fait de l'entourage n'est donc pas entièrement suffisant pour gérer la question de l'inventivité, de la créativité à outrance. Il faut donc que les premiers responsables eux-mêmes disposent de ces qualités.
Comme on le voit, il ne sera pas facile pour nous, d'avoir des dirigeants de cette stature, mais en même temps, c'est la condition à remplir pour avoir le moindre espoir, la moindre chance de réussir à bâtir nos nouveaux Etats sur du roc.
Anne-Cécile ROBERT : L'Afrique au secours de l'Occident.
Editions de l'Atelier/ les Editions Ouvrières, Paris 2006



22/10/2010
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