Africa Renaissance

Africa Renaissance

Un obstacle à la renaissance africaine : la spiritualité

Un obstacle à la renaissance africaine : la spiritualité


Les évidences pour ceux qui voient

Pour tous ceux qui réfléchissent, il est devenu évident qu'au stade actuel de notre évolution et eu égard à de très nombreux signes, l'Afrique est réellement entrain de renaître. Il serait hasardeux de prédire une vitesse du mouvement, ou encore plus un temps précis pour constater concrètement le phénomène. Cela signifie que la renaissance qui est enclenchée peut prendre encore vingt, cinquante, cent ou mille ans, avant de devenir patente. Ce ne sera qu'à ce moment et à ce moment seulement, que la chose profitera à chaque Africaine et à chaque Africain. Il est donc impérieux de prendre toutes les dispositions afin que l'échéance soit la plus écourtée possible, afin que les souffrances qui sont les nôtres depuis tant de siècles prennent le plus rapidement fin, au plus grand bonheur de nos concitoyens. Pour cela, il importe de savoir exactement sur quel mécanisme jouer pour provoquer l'accélération voulue. La présente réflexion se situe dans le sens d'une juste compréhension d'un de ceux-ci. Signalons que de fausses pistes sont parfois présentées comme les priorités du continent noir. Ce serait donc à cause du manque de maîtrise de ces dernières que l'Afrique patauge piteusement et depuis si longtemps dans la fange.

La première et la principale de ces fausses pistes est sans doute notre pauvreté ou si l'on veut, tout ce qui concerne les problèmes matériels. S'il est vrai en effet que nous avons besoin de nous nourrir et d'avoir un minimum matériel pour vivre, il est important de saisir que cela ne saurait aucunement être un élément décisif. Ceux qui nous font miroiter l'économique comme le problème primordial de l'Afrique (les Occidentaux), sont soit d'une ignorance crasse, soit sont de fieffés menteurs ! On sait pertinemment que leur renaissance à eux, qui est intervenue seulement aux XVe et XVIe siècles, n'était nullement axée sur une quelconque économie ! Eux qui sont beaucoup plus matérialistes que nous ne le serons peut-être jamais. L'Encyclopédie Encarta 2009 est très claire là-dessus. La renaissance occidentale a été ce mouvement intellectuel, artistique et politique, qui a permis à l'Europe de s'affranchir de la tutelle extérieure, constituée essentiellement par la domination du monde arabo-musulman, dont la tête de pont a été pendant longtemps constituée par l'empire Ottoman. Tout le reste est parti de cette conquête. L'Italie qui a déclenché ce mouvement n'a, à notre connaissance, jamais été une grande puissance économique ! Mais tous sont unanimes à reconnaître que le mouvement de la renaissance occidentale est bien parti d'Italie. On insiste même pour faire ressortir un seul élément qui a entraîné tout le reste : l'art!


Si donc l'Occident qui est si matérialiste a été obligé de passer par des valeurs autres que matériels pour réussir sa renaissance, c'est qu'il est une loi que nulle part, aucune renaissance ne saurait se fonder sur ces genres d'éléments !
La loi immuable pour toute renaissance semble donc évidente. Sa juste compréhension se trouve dans le mot lui-même. Pour re-naître en effet, il est indispensable d'être d'abord né au moins une première fois ! On n'oublie souvent que les sociétés sont exactement comme les hommes : elles naissent, grandissent, vieillissent et meurent. Par conséquent, comme eux, elles peuvent de même renaître. Seulement les ressorts essentiels de cette renaissance dépendent toujours de la réalité de base de chacune d'elle. Pour l'Africain, aussi loin que l'on puisse remonter, il semble évident que seuls les éléments spirituels ont toujours constitué la base fondamentale. Il est donc normal qu'aucune solution du ressort qui nous concerne ne puisse s'y dérober. Du reste l'histoire de l'Egypte des pharaons le confirme de manière péremptoire, comme l'affirme Esso Ngon : "Ainsi, comme nous l'apprend l'histoire pharaonique rapportée par Cheikh Anta Diop, Chaque fois que l'unité de l'Egypte a été ébranlée, le peuple égyptien s'est regroupé autour des temples, autour des prêtres, qui ont toujours été les artisans de la libération qui s'en est suivie. De même lorsque l'Egypte a été envahie par les Grecs, ensuite par les Romains, toute la vie culturelle et civilisationnelle de l'Egypte s'est réfugiée dans les temples, bastion resté inviolé par l'occupant. Enfin, la civilisation pharaonique est morte, lorsque les temples ont été violés!" On le voit, c'est donc du côté spirituel, que se situe probablement notre bouée de salut.
Mais que constatons-nous malheureusement ? Que la quasi-totalité des Africains se sont engouffrés depuis si longtemps dans les religions et les spiritualités étrangères ! Le problème le plus grave, c'est qu'ils ne se rendent même plus compte de l'ampleur du drame. Ils ont tous été persuadés que seules ces croyances et ces pratiques sont à même de les conduire au ciel et qu'aucune spiritualité africaine n'est capable d'une telle prouesse. Ils voient bien que les peuples divers à travers le monde ont gardé leurs pratiques spirituelles propres (en gros les Arabes sont musulmans, les Européens sont chrétiens, les Asiatiques sont bouddhistes ou shintoïstes, etc.), mais eux seuls n'ont aucune chance de salut avec leur religion et leur spiritualité, même s'ils constatent pas mal de point de jonctions entre toutes les religions du monde ! Pour le ciel, ils ont renoncé à leurs ancêtres, à leurs autels, bref à leur réalité propre. Et ils ont du même coup, abandonné tout accès à la réflexion rationnelle. Ils refusent désormais des vérités simples comme par exemple celle énoncée par Doumby Fakoly, à savoir que c'est l'homme qui crée Dieu à son image et non le contraire, comme le soutiennent les religions universalistes. Tous les dieux des Blancs sont blancs, ceux des Jaunes sont jaunes etc., mais aucune évidence n'est plus à même de les faire raisonner. Seul le besoin d'aller au ciel compte ! Un ciel varié et ondoyant, au passage d'une croyance à l'autre, mais qu'importe ! Quel drame cela constituerait pour eux si après la mort, ils se rendaient compte qu'il n'y avait aucun ciel tel que décrit par les religions révélées ! Ils auraient alors tout perdu, leur corps et leurs âmes. Or la notion de réincarnation a des preuves si nombreuses et si solides qu'une vie unique se terminant par le paradis ou l'enfer, que nos adeptes africains de ces croyances ont des soucis à se faire !

Un dieu à la psychologie torturée, mais populaire en Afrique !

Des notions à l'odeur de racisme rampant comme celles de races choisies, de peuples de Dieu, n'effraient même plus les Africains. Raisonnons : les autres peuples qui ne seraient pas ceux de Dieu, seraient de qui alors ? Il y aurait-t-il, peut-il y avoir quelqu'un d'autre qui aurait créé ces peuples à part Dieu lui-même ? Sinon, comme le soutiennent même leurs religions, pourquoi Dieu abandonnerait-il ces peuples une bonne fois pour toute, sans possibilité de repentance ? Si Dieu peut pardonner comme il semble le montrer à tout détour de chemin, pourquoi ne pardonnerait-il pas à un moment ou à un autre au peuple noir, le forçant ainsi à n'avoir de salut qu'en empruntant les chemins des autres peuples qui, apparemment, n'ont pas plus de qualités ou de mérites que lui ? Comme on le voit, les questions sont nombreuses, graves, incompréhensibles pour un esprit rationnel, mais les Noirs n'ont plus le temps de se les poser. C'est vrai aussi qu'à chaque fois qu'une question rationnellement embarrassante se pose, ils préfèrent se réfugier derrière des inepties du genre : "Ce qui est rationnel est anti Dieu, il faut croire sans comprendre ! Seuls ces genres d'individus iraient au ciel"! Autrement dit, Dieu n'accepterait que les imbéciles dans son paradis, après avoir lui-même créé l'intelligence. Il aurait donc peur des êtres faits par lui, qui seraient intelligents, perspicaces, courageux dans leur réflexion ! Comment un être à l'intelligence illimitée comme Dieu devrait l'être, pourrait-il avoir peur d'êtres à intelligence limitée comme les êtres humains ? Et puis, que fait-on de l'omniscience Dieu ? Il connaît le passé, le présent et l'avenir, mais il accepte créer des êtres qui vont lui désobéir, afin qu'il les envoie ad vitae aeternam en enfer, alors même qu'ils n'ont pas péché ad vitae aeternam, n'étant pas éternels !!! ? Un dieu de ce genre ne sera certainement pas le Dieu universel qui a tout créé et est donc responsable de tout et de tous ! Un dieu qui dit : "C'est moi le Dieu de ton père, le Dieu d'Abraham, le Dieu d'Isaac et le Dieu de Jacob"1, peut-il être le Dieu universel ? On ne peut pas être contre des dieux particuliers bien sûr ; pour l'Africain ces genres de divinités existent puisque tout au long de son histoire, il a conçu les choses ainsi. C'est la raison pour laquelle, il est resté le peuple tolérant entre tous jusqu'à présent, surtout au niveau de la croyance et de la pratique religieuse ! Alors de grâce, ne prenons donc pas un dieu particulier pour le Dieu universel !

L'histoire des religions montre d'ailleurs que les hommes n'ont pas manqué d'utiliser les spécificités du dieu d'Israël pour se faire du tort. Ainsi par exemple, tout au long de son histoire, l'Apartheid sud-africain a toujours soutenu que le Nègre avait été maudit depuis Noé, l'ami du dieu d'Israël sauvé des eaux du déluge. Si Noé a maudit, donc dieu l'a fait ! Et jusqu'au moment où nous écrivons ces lignes, beaucoup de chrétiens (même Négro-africains) pensent que Dieu nous a maudits et qu'aucun salut ne peut se trouver avec nos croyances ! Mais tout de même, si Dieu nous a maudits en tant que race, pourquoi accepterait-il certains d'entre nous, tous ceux qui suivent sa voie? Tous ces Noirs qui se sont engouffrés dans les religions universalistes ne sont-ils plus des Noirs ? Certains répondraient que c'est parce que ces derniers lui auraient fait amende honorable, prouvant ainsi un dieu contrebandier corruptible et dont les lois sont sujettes à négociation. On peut continuer ainsi cette longue liste des inconséquences d'un dieu particulier, pris pour le Dieu universel. Au terme de l'analyse, on aboutit à un dieu méchant, fourbe, corruptible, jaloux, vindicatif, bref un dieu ayant le genre de défauts qu'on ne pardonnerait même pas à un être humain ! Mais qu'importe, les Nègres le suivent puisque c'est la seule voie pour arriver au ciel. A ce rythme, on se demande à quoi peut ressembler ce ciel, et si la vie post-mortem pourrait être aussi agréable qu'on voudrait nous le faire croire !

Revenir à la spiritualité de nos pères

                                          Un sacrifice

Il apparaît clairement au terme de l'analyse, que la solution à toutes ces contradictions et du même coup à notre flottement en tant que peuple, réside dans cette reconquête de notre spiritualité propre. Mais pour ce faire, il y a quand même certaines questions à se poser et dont la plus importante est la suivante : "pourquoi sommes-nous arrivés au niveau de délabrement mental et spirituel où nous sommes" ? La réponse est très claire. Si beaucoup d'Africains ont abandonné la spiritualité africaine à un certain moment, c'est qu'elle était devenue, pour des raisons diverses, inefficace ! A quoi sert-il de s'adresser à des autels impotents et inopérants ? Comme le soutient donc la sagesse africaine : "Si tu réprimandes le chat pour avoir mangé le soumbala, n'oublie pas non plus de réprimander le soumbala pour avoir dégagé autant d'odeur" ! Cela signifie que pour demander aux Africains d'aujourd'hui, d'avoir confiance de nouveau à nos autels, nos fétiches, nos dieux et divinités, il importe de garantir l'efficacité d'antan de ceux-ci, leur puissance du temps de nos aïeux. Cela est-il possible aujourd'hui ?

Contrairement à ce qu'on pourrait penser, la réponse à cette question est catégorique : un Oui ! massif. Et pourquoi? Pour la raison simple, que contrairement au Dieu unique, les dieux, les divinités, les autels, les fétiches, sont des êtres vivants qui se nourrissent pour vivre et prospérer. Par conséquent, le manque de nourriture peut diminuer leur force et même parfois les faire mourir ! Nos divinités, privées d'aliments se sont donc étiolées au point de devenir donc celles que nous connaissons présentement : incapables, sourdes et muettes à nos supplications. Reste à savoir c'est quoi la nourriture d'une divinité, d'un autel, d'un fétiche. Comme les batteries qu'il faut recharger de temps à autre, comme les animaux ou les êtres humains qui vivent en se nourrissant, chacun selon sa nature, les éléments spirituels sont exactement de la même nature. Ils ont besoin, pour vivre grandir et devenir plus forts, de leur nourriture ou de leur rechargement (c'est selon), constitués de prières, de sangs répandus, de pensées particulières, d'incantations, etc.

Il devient de ce fait patent, que du fait de l'absence de fourniture de ces besoins, les fétiches et les dieux africains meurent ou deviennent inopérants, les divinités et les autels de même. Pour ceux qui douteraient de ces affirmations, ils n'ont qu'à se dire que comme chrétiens, musulmans ou autres, ils nourrissent exactement de la même manière leurs dieux et égrégores étrangers ! Et c'est précisément parce que ceux-ci sont bien nourris par les prières, les pensées, les sacrifices, qu'ils sont forts. Cette force naturellement en retour leur profite, mais ce qu'ils ignorent c'est qu'ils ne bénéficient que d'une infime partie de celle-ci. La grande part retourne au bénéfice des propriétaires de ces dieux et égrégores qui, au départ les ont institués avec des missions précises ! De ces missions, nous sommes le plus souvent ignorants. C'est pourquoi, en les revigorant sans en connaître les missions précises, nous les renforçons parfois et même souvent à notre propre détriment ! Et cela s'explique très facilement. Un exemple simpliste le montre. Prenons le cas d'un homme qui a apprivoisé un tigre. Il le nourrit, naturellement avec ce que mangent les tigres : la viande. Supposons maintenant qu'un propriétaire de vaches se mette à aider à faire grandir ce tigre. Naturellement, il est tout à fait prévisible qu'un de ces jours, le tigre se mettra à ravager le parc de notre éleveur de vaches. Il continue de même à faire ce pour quoi son propriétaire l'a apprivoisé, et en devenant plus fort, il devient plus efficace. On peut imaginer enfin qu'au passage, l'éleveur de vaches, par ricochet, parce qu'il vit dans l'entourage du tigre, bénéficie de certains avantages procurés par la présence de notre tigre comme par exemple éloigner les autres fauves, créant ainsi un environnement apaisé. Mais notre éleveur gagne-t-il autant dans l'opération que le propriétaire du tigre ?

La conclusion se tire d'elle-même : la renaissance africaine doit aujourd'hui reprendre une de ses composantes essentielles : sa spiritualité. Pour cela, les Africains doivent sans aucune gêne particulière, retourner aux dieux, aux génies, aux pratiques spirituelles de leurs pères. Ils sont les seuls qui ont construit l'Afrique et l'ont élevée au rang qu'elle a occupé durant des millénaires, au plus grand profit de toute l'humanité : la première place des nations ! Il faut se rendre compte qu'il n'y a aucune autre solution. La renaissance africaine deviendra patente quand et seulement quand cette donne sera comprise et prise correctement en compte. Et cela dépend uniquement de nous.
Il ne faut pas se tromper. Dieu est unique. Toutes les croyances africaines le confirment. Il est créateur de tout et de tous. Il ne peut être ni raciste, ni injuste, ni stupide, ni contre aucune composante de sa propre création. Si la pratique spirituelle de nos aïeux était mauvaise, elle n'aurait pas eu les fruits qu'elle a produits pour le genre humain. Le reste, tout le reste, notamment les pratiques spirituelles mercantilistes, n'ont de toute façon aucun avenir probant à terme, ni pour ceux qui les ont produites, ni pour ceux qui les ont adoptées. Seuls les faibles d'esprit ne perçoivent pas encore ces évidences. La roue elle, est en marche. Inexorablement !

 

 

 

 

 

 

 

                                                            



[1] - Cf. le bimensuel burkinabé L'Evénement N°148 du 25 septembre 2008.

[2] - Hubert DESCHAMPS : Les religions de l'Afrique noire. Editions Presses universitaires de France. Que sais-je ? Paris 1960 (pp77-78)

[3] - Cheikh Hamidou Kane : L'aventure ambigüe. Julliard 10/18,  1961 (p. 47)



27/10/2009
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