deux princes comme le jour et la nuit
Deux princes comme le Jour et
« combien il est louable à un prince de respecter ses promesses et de vivre avec intégrité, non dans les fourberies, chacun le conçoit clairement. Cependant l'histoire de notre temps nous enseigne que seuls ont accompli de grandes choses les princes qui ont fait peu cas de leur parole et su adroitement endormir la cervelle des gens ; en fin de compte, ils ont triomphé des honnêtes et des loyaux… Si les hommes étaient gens de bien, mon précepte serait condamnable : mais comme ce sont tous de tristes sires, et qu'ils n'observeraient pas leurs propres promesses, tu n'as pas on plus à observer les tiennes… »conseille Machiavel au Prince d'Occident. Cette façon de concevoir la gestion de la cité, est devenue si courante et si naturelle, que tout le monde est convaincu que c'est la seule manière de faire la politique, avec mensonges et malhonnêteté. Ainsi, Machiavel, à travers Le Prince est-il devenu le maître à penser de nombreux politiciens du monde. On oublie souvent qu'il ne s'agit là que d'une façon occidentale de voir comment diriger un peuple, une nation, un pays. L'histoire nous apprend en effet que l'Occident a géré la cité à travers la force, le meurtre ou la fourberie. Machiavel n'a fait que systématiser une pratique. Il est faux de penser que la politique n'a été faite et ne peut se faire que de cette manière. L'histoire est formelle là-dessus.
Voilà comment le Tchati (vizir), c'est-à-dire le Premier Ministre pharaonique s'est, bien avant machiavel, prononcé sur cette question : « A la vérité être vizir n'est pas doux mais amer. Car il s'agit de ne pas avoir d'égards pour les princes et les autorités, de ne pas réduire à son profit, absolument aucun être humain au rang d'esclave .Ce qu'il faut faire, c'est s'en tenir à la loi .Un prince vit au grand jour. L'eau et le vent renseignent sur ce qu'il fait et jamais ce qu'il fait ne demeure ignoré. Mais c'est une sauvegarde pour un prince que d'agir conformément aux prescriptions, en faisant ce qu'il a dit… ». autre société donc, autre conception de la politique. On le voit bien, le prince est tenu de respecter les prescriptions, d'être droit et honnête. A notre connaissance, il n'y a jamais eu de tendances contraires, durant l'histoire multi-millénaire négro-africaine. Bien entendu tous les princes négro-africains n'ont pas été droits et honnêtes ! Mais dans la société africaine, il n'y a jamais eu de deux poids deux mesures à ce niveau : aucune liberté n'a été permise à quiconque, de présenter des réflexions du genre de celles de Machiavel. Et si cela a été tenté, l'histoire ne l'a pas retenu. Le prince, le roi, le dirigeant de manière générale, a toujours eu une seule boussole,
Déesse Maât (dessin de Champollion)
Si ces deux conceptions diamétralement opposées ont réellement existé, et elles l'ont été, il est désormais établi que l'Afrique toute entière est entrée dans la brousse, le jour où ses dirigeants ont embrassé la « religion politique » de l'Occident.
L'invincibilité du requin, c'est dans l'eau. Hors de celle-ci, le redoutable requin sera un bon repas pour la hyène au bas train ! Une vérité élémentaire doit être assenée une fois pour toute : l'histoire comme la politique sont des créations humaines ; aucune n'est immuable. De la même manière que l'histoire n'est pas terminée, il faut dire qu'aucune institution humaine n'est définitive. Le jour où il faudra changer la démocratie occidentale par autre chose, les Négro-africains attendront-ils toujours que la leçon vienne du Nord, ou bien comprendront-ils qu'ils ont mieux à faire ? C'est la seule question intéressante qu'il nous faut aujourd'hui poser ! L'intelligence voudrait qu'on y pense dès maintenant à la réponse.
Machiavel : Le Prince. Librairie générale française. 1983
Centre d'Etudes et de Recherches sur les Valeurs Africaines (CERVA) : La parole africaine. Editions ACIVA. N° 1
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