L'Afrique doit renaître
Renaissance ou développement : l’Afrique à la croisée des chemins
Dans l’esprit de la majorité des Africains, le développement est la panacée qui résoudra sinon la totalité, du moins la majorité de nos problèmes. Cela semble tout à fait naturel. Dans cette perspective, l’alternative du titre de ce Focus Africa est presqu’un non-sens ! Cela d’autant plus que la notion de « renaissance » est peu connue sinon crainte, car évoquant une chose que les « religions révélées » rejettent. Cependant, et même si les principes démocratiques le proclament, est-ce à la majorité de décider de la destinée d’un peuple ? Au risque de heurter les bonnes mœurs, nous devrons néanmoins répondre par la négative.
C’est à l’élite d’une nation de décider de ces questions. Une nation est en fait un organisme vivant. Or dans un tel organisme, les rôles sont repartis entre les différentes parties. Par exemple, quelle que soit son importance, ce n’est pas au cerveau de labourer le champ, même si en amont, il a été déterminant dans le choix de l’endroit ou celui-ci se trouve ! Sur des principes de base de ce genre, le continent africain a-t-il avantageusement besoin d’une renaissance ou d’un développement ?
Au niveau du développement, sans revenir sur des choses connues, on peut quand même retenir que ce concept de « développement », tel que l’économie moderne le conçoit, est en fait très récent. Il date de la fin des années 1940. Ce sont les Etats-Unis qui ont inventé en ces années-là le concept, pour contourner le « Pacte colonial » que les Européens colonisateurs avaient mis en place pour exploiter seuls les richesses de l’Afrique. Parce que les Etats-Unis aussi voulaient leur part du gâteau. Comme quoi, notre continent draine toutes les convoitises ! C’est après analyse d’un certain nombre de logiques du genre, que José Do Nascimento[1] affirme que le « paradigme du développement », après examen, n’est qu’un concept imaginé pour égarer les élites africaines ! En revanche, il estime à la suite du professeur Cheikh Anta Diop que loin de prôner un quelconque développement pour l’Afrique, c’est plutôt d’une renaissance[2] que le continent noir a besoin !
La renaissance précisément, est à l’antipode du développement, en ce sens qu’elle ne suppose pas que l’Afrique doive partir de presque rien (le sous-développement, la pauvreté, l’arriération), pour espérer rattraper un quelconque groupe, sensé mener la course en tête. Au contraire, elle sous-entend que nous avons déjà été, que nous sommes tombés au niveau où nous sommes, pour des raisons parfaitement intelligibles aujourd’hui maîtrisées, et qu’il nous suffit de renouer avec un état que nous avons connu, en retrouvant le fil conducteur. Du reste, une telle conception est historiquement fondée, puisqu’on reconnaît qu’à un certain moment de l’histoire humaine, nous avons été la boussole du monde ! Mais le plus gros avantage de cette manière de voir les choses, est qu’elle permet d’éviter aisément cette pensée unique d’aujourd’hui, qui soutient qu’il n’y aurait qu’une seule façon de se « développer », une seule manière de construire un mieux-être pour les sociétés. Elle permet de pouvoir opérer un choix, parce qu’une autre alternative est possible, puisque ayant déjà avoir existé auparavant. Du coup, fini ce complexe d’infériorité qui handicape gravement ce génie créateur si indispensable dans des actions qui requièrent une confiance libératrice en soi. Fini ce flottement dû à une soi-disant caution qu’on attendrait d’un maître sensé être le seul à même de discerner le vrai du faux, le juste de l’égarement, la règle du tâtonnement ! C’est justement le rôle que semble ignorer malheureusement nos élites devenus plutôt singes que génies créateurs ! Voilà pourquoi, il faut absolument que cette frange de notre société se ressaisisse au lieu de jouer les caisses de résonance et d’ignorer les contours précis de notre histoire et de notre culture spécifiques ! Les Asiatiques assurent qu’il n’y a pas de vent contraire pour celui qui sait où il va ! Une sagesse à méditer. Mais nos intellectuels dirigeant nos Etats savent-il ce qu’est une « renaissance » et quels en sont les mécanismes ? A leur décharge, peut-être faudrait-il avoir en mémoire cette sagesse africaine : « Le nénuphar a ravi l’épouse du feu et le feu hésite à franchir le seuil ! ». Mais alors, à qui la faute ?
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